L'arc-en-ciel sur San Francisco

Le pont du Golden Gate venait d'être achevé, il restait à le peindre, et juste alors voilà qu'arrive un arc-en-ciel. Le pont regarde attentivement les sept couleurs, puis il se dit : "Me peindre en quoi, en violet ? C'est trop laid. En indigo ? J'suis pas dingo. En bleu ? Des queues. En vert ? Et ton grand-père ? En jaune ? Pour avoir l'air d'une cône ? En orangé ? J'aime mieux partir à l'étranger. En rouge, mais oui, en rouge, ohé les peintres, ohé, tout en rouge, et qu'ça bouge !" Et le Golden Gate a donc été complètement peint en rouge, et c'était d'une telle perfection, ce pont vermillon, qu'un morceau d'arc-en-ciel est resté là, comme celui que tu vois, à l'admirer. Mais l'histoire continue.

On dit que la déesse Isis, là-haut, en voyant ce morceau d'arc-en-ciel, a voulu se faire une grande écharpe aux mêmes couleurs. Et tout le monde, dans le ciel, de travailler et travailler, et tout ce temps-là, la pluie de pleuvoir et pleuvoir. La pluie s'arrête, au même instant l'écharpe était finie, Isis alors, sans perdre une seule seconde, Isis est sortie avec elle, avec son écharpe immense, à travers tout le ciel, qui resplendissait de ses sept couleurs, et San Francisco, en bas, était si éblouie, au vu de tant de beauté, que toutes ses maisons, tous ses immeubles, tous ses buildings levaient leurs bras, tendaient leurs mains vers elle, Isis, vers la merveilleuse déesse à l'écharpe. Et c'est comme ça que San Francisco, depuis, est restée ainsi toute droite vers le ciel, toute douceur, toute joie, et de toutes les villes, regarde, c'est la plus paisible et la plus heureuse.

©Maurice Regnaut